Le Musée des Civilisations noires de Dakar rouvre ses portes pour son expo JonOne : « J’ai beaucoup à apprendre des artistes africains du Street Art »

Le Musée des Civilisations noires de Dakar rouvre ses portes pour son expo JonOne : « J’ai beaucoup à apprendre des artistes africains du Street Art »

L'artiste américain du Street Art JonOne expose au Musée des civilisations noires de Dakar du 12 au 22 novembre 2020 (Photo : @Oumy Diaw). 


L’artiste américain du Street Art JonOne expose pour la seconde fois de sa carrière sur le sol africain. Après Abidjan en février dernier, ses toiles sont aujourd'hui au Musée des Civilisations noires de Dakar grâce à son partenaire ivoirien ArtTime.

De notre envoyé spécial à Dakar (Sénégal), Clément Yao

De New York à Londres, de Paris à Tokyo en passant par Genève et Bruxelles où la plupart des musées ont fermé leurs portes pour cause de Covid-19, le Musée des Civilisations noires a carrément réouvert ses portes pour l’exposition de JonOne, dans le strict respect bien sûr des mesures sanitaires en vigueur. Il est vrai qu'au Sénégal, la pandémie semble « maîtrisée » avec autant de malades que de guérisons : 15 806 personnes infectées contre 15 425 guéries et 329 décès.

Le public dakarois est au rendez-vous de cette exposition baptisée « Héritage » et placée sous le parrainage du chef de l’Etat sénégalais, Macky Sall. Pour les autorités sénégalaises, la venue de l’artiste américain au Sénégal est perçue comme une bénédiction culturelle pour la reprise des activités du musée après une longue période de fermeture liée au confinement.

« La communauté sénégalaise du Street Art pourra s’inspirer du talent et de la réussite de JonOne. Je note avec beaucoup de satisfaction l’intérêt que vous manifestez au Sénégal dans le programme des activités d’ArtTime », a fait observer Ousseynou Wade, représentant le Directeur du musée, le Professeur Hamady Bocoum, pour l'ouverture de cette exposition.

Quant à l’artiste qui a été contraint d’annuler une quinzaine d’expositions au cours de l’année 2020 à cause de l'épidémie, il ne cache pas sa joie de se retrouver au Sénégal. « J’ai la chance de faire cette exposition à Dakar qui n’a pas été annulée et de continuer ainsi à m’exprimer. J’ai eu beaucoup de chance parce que je ne suis pas moi-même tombé malade, mais je fais très attention », confie-t-il.

« Notre rôle est de donner un peu

D’espoir à ce monde en perdition »

« Notre rôle est de donner un peu d’espoir à ce monde en perdition…Je suis heureux, poursuit-il, de prendre part à cette exposition exceptionnelle sur le sol africain dans le contexte particulier de la pandémie de Covid-19 où le monde entier est confiné…Aujourd’hui, quand on allume la télé, on est déprimé par les drames que vit notre monde. Le rôle des artistes que nous sommes est de donner un peu d’espoir à ce monde en perdition. »

Dans une des immenses salles du musée transformée pour l’occasion en galerie, ArtTime n’a rien négligé au plan de l’organisation, de la présentation des œuvres et de la qualité de l’accueil pendant les dix jours de l’exposition du 12 novembre au 22 novembre. Les amateurs, professionnels, collectionneurs et, bien sûr, le grand public ont le privilège d’aller contempler et même de s’offrir à des tarifs « tropicalisés » les plus belles œuvres colorées de JonOne cotées sur le marché mondial.

Comme à Abidjan, les Dakarois ont eu également droit à une soirée de vernissage. Et, pour ce rendez-vous important, JonOne a démontré une nouvelle fois son grand talent d’artiste de renommée internationale en peignant plusieurs toiles dont la plus impressionnante reste cette grande toile démesurée (de 8x3 mètres) couvrant une des façades de la salle d’exposition. Sans oublier cette longue pirogue navigable taillée à la main par des artisans et taguée par l’artiste, qui fut une des vedettes de l’exposition, achetée par un collectionneur venu de Marrakech, au Maroc, au prix de 18.000 euros. Que dire de la dizaine de planches de surf également taguées par l’artiste vendues comme des petits pains au prix unitaire (livraison comprise) de 6 500 euros.

Cette exposition « Héritage » de JonOne, qui connaît un succès fou depuis l’ouverture, a été aussi l’occasion pour l’artiste de rencontrer des talents locaux à l’instar de Docta, un célèbre artiste graffeur de Dakar, un des pionniers du graffiti au Sénégal, et de se mettre en immersion dans l’environnement très particulier de la création artistique contemporaine en Afrique. Des artistes bourrés de talents se démarquant par leur manière de peindre et le matériel de travail parfois rudimentaire qu’on ne trouve nulle part ailleurs chez les artistes occidentaux.

Séduit par l’originalité de la création artistique des graffeurs sénégalais, JonOne a, en toute modestie, fait cette confession : « J’ai toujours été impressionné par les artistes africains pour qui j’ai énormément de respect. C’est à moi d’apprendre d’eux parce qu’ils sont plus créatifs et talentueux que moi. »

Mais tout compte fait, JonOne trouve des similitudes entre sa manière de peindre notamment les gestes et les messages véhiculés inspirés de la vie quotidienne et les conditions de vie et de travail des artistes africains. « J’ai moi-même commencé le graffiti dans la rue avec des peintures en aérosol », a-t-il ainsi rappelé, en se disant influencé par ses origines caribéennes et donc africaines. Une parenthèse de sa vie d’artiste pour justement faire savoir qu’il n’est pas un artiste né avec des pinceaux en or dans les mains, mais qu’il a dû travailler dur pour atteindre le sommet de son art avant de connaître la reconnaissance mondiale.

Pour marquer son passage dans la capitale sénégalaise, JonOne a légué un héritage grandeur nature en taguant sur 70 mètres une portion de la clôture du Musée des Civilisations noires de Dakar.

Clément Yao

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