En le recevant à l'Elysée lundi 5 mars, le président français Emmanuel Macron a encouragé son homologue béninois, Patrice Talon, à poursuivre son « courageux » programme pour réformer son pays... alors que des mouvements d’humeur bruissent dans les rues de Cotonou.

Par Clément Yao

La visite de travail longtemps sollicitée par la présidence béninoise auprès de l’Elysée a eu enfin lieu pour le plus grand bonheur de Patrice Talon qui n’a pas caché, à l’issue de son tête-à-tête avec Emmanuel Macron, sa joie. Cette audience a été surtout un succès, côté béninois, au vu des déclarations de bonnes intentions et des promesses d’appuis financiers que la France compte accorder au Bénin au titre de plusieurs projets développement pour relancer la croissance économique de ce pays « stable, démocratique, amical ».

Les deux chefs d’Etat ont décidé d’intensifier leur partenariat dans différents domaines de coopération et de mettre l'accent sur cinq priorités qui leur tiennent à cœur. Un accord cadre devrait être signé dans les prochains jours pour attester de l’excellence de cette coopération bilatérale.

Exemple concret, une station balnéaire longue de quatre kilomètres sera réalisée par le Club Med

Au titre de la santé, Paris accordera une aide de 175 millions d’euros pour la construction d’un centre hospitalier universitaire par un accompagnement de garantie de la Banque publique d’investissement (BpiFrance). Quelque 58 millions seront affectés à la réalisation de projets de villes durables pour lutter contre le changement climatique grâce à la signature d’un accord avec l’Agence française de développement (AFD) et 43 autres millions via l’AFD pour le financement de projets dans le domaine du tourisme, pour lesquels plusieurs grands groupes français seront mis à contribution. Exemple concret, une station balnéaire longue de quatre kilomètres sera réalisée par le Club Med dans le village d’Avélékété sur la route Cotonou et Ouidah.

Des financements seront par ailleurs mobilisés pour l’éducation et la formation, et un fort soutien sera enfin apporté à « l’offre culturelle » concernant la restitution d’œuvres d’art du patrimoine culturel béninois conservées dans des musées français. Il s’agit de la concrétisation de la promesse tenue par Emmanuel Macron lors de son déplacement à Ouagadougou au Burkina Faso.

Sur ce dernier sujet précisément, Emmanuel Macron a annoncé que le président du musée du Quai Branly se rendrait au Bénin pour voir dans quelle mesure ces transactions d’œuvres devraient se faire. La France veut surtout s’assurer que ces biens de valeurs inestimables seront conservés dans des conditions idoines dès leur restitution et qu’ils ne tomberaient pas entre les mains de trafiquants de tout acabit 

Prenant la parole aux côtés d’Emmanuel Macron lors de la conférence de presse conjointe, le chef de l’Etat béninois, très détendu, a tout d’abord salué « la qualité de la coopération » d’amitié entre les deux pays et s’est dit « satisfait » du « niveau de financement jamais égalé en si peu de temps » de la France aux côtés du Bénin.

"Notre faiblesse, c’est la mauvaise gouvernance, qui bloque notre développement"

Sur la politique intérieure, Patrice Talon a remercié Emmanuel Macron pour le soutien de la France à ses « réformes courageuses et impopulaires » engagées par son gouvernement qui créent malheureusement quelques remous et tensions dans le pays. « C’est la seule voie de sortie », a-t-il observé.

Il a aussi indiqué sa lutte implacable contre la corruption dans son pays. « Notre faiblesse, c’est la mauvaise gouvernance. Nous sommes résolus à donner une réponse positive et visible, à nous-mêmes et au monde entier, sur notre volonté de renoncer à cette image qui bloque notre développement », a déploré Patrice Talon. Il a également fait cas du niveau de pauvreté et de la concentration des richesses entre les mains d’une minorité. Des disparités qu’il a promis de corriger sous son quinquennat. 

Outre les grandes réformes et la moralisation de la vie publique, le président béninois a également affiché sa volonté de créer de la richesse notamment dans le tourisme car le Bénin dispose d’une importante panoplie de patrimoines à promouvoir.

« Dans quelques années, nous pouvons changer les choses. Quand on est que 11 millions d’habitants, il est plus facile de changer la donne. Le Bénin est à notre portée. C’est ce qui justifie notre volonté d’agir et de solliciter les partenaires pour nous accompagner », a-t-il conclu.

Au terme de cette visite de travail qui a duré près de deux heures, Patrice Talon a invité Emmanuel Macron à se rendre au Bénin pour constater, de lui-même, les résultats de ses grandes réformes engagées ainsi que les évolutions dans le domaine du tourisme. En tout état de cause, cette visite réussie met un terme à la polémique qui a enflé autour du rendez-vous manqué au mois d’octobre 2017.